lundi 20 février 2012

M comme Mondialisation


(suite de mon abécédaire de campagne)

La campagne présidentielle est lancée. Les programmes des principaux candidats commencent à prendre forme.

Sous forme d'un abécédaire, en passant par D comme Dette, F comme Fiscalité, I comme Inégalités, ou V comme Valeurs, je pose ici aux candidats les questions dont dépendra en grande partie mon vote en avril prochain.

Au menu aujourd'hui : M comme Mondialisation.

Ma question

Pensez-vous que la mondialisation est pour la France une menace, ou au contraire une opportunité à saisir ? Faut-il mettre en place des mesures de protection contre les importations en provenances de certains pays, et sur la base de quels critères ?

Mon avis

Je suis convaincu que la mondialisation est d'abord une chance, tant pour les pays pauvres que pour les pays riches comme le nôtre, même si elle n'est pas exempte, localement et temporairement, de menaces.

Je crois que la tentation protectionniste, aggravée par la crise que nous connaissons, est une tentation suicidaire, et qu'il est du devoir de tout responsable politique d'y résister.

Deux exemples récents illustrent la spectaculaire absence de réflexion, et l'incohérence, de la majorité de nos politiques sur le sujet.

Premier exemple : Renault vient d'inaugurer une usine de production de voitures low-cost à Tanger. Dans une touchante unanimité, à l'exception de quelques uns, nos hommes et femmes politiques de tout bord poussent des cris d'orfraie : c'est un scandale ! comme aurait dit, en son temps, le regretté Georges Marchais. De Christian Estrosi (UMP) à Louis Aliot (Front National) en passant par Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République) et François Hollande (Parti Socialiste), tous s'étranglent de rage, et menacent Renault des pires châtiments (non sans arrière-pensée, s'agissant du dernier cité : Carlos Ghosn est probablement dans sa ligne de mire).

Seul ou presque, François Chérèque ose signaler que c'est une bonne nouvelle à la fois pour les Marocains, qui vont avoir la chance de "produire marocain", et pour Renault, entreprise française qui investit et se développe ; que produire des voitures low-cost en France n'aurait aucun sens, compte tenu de la différence de coût - à moins de vouloir ramener le coût de production en France au niveau de celui du Maroc ; que la France ne trouvera son salut industriel qu'en développant la recherche et l'innovation technique et commerciale, qui seules lui permettront de fabriquer des produits de haut de gamme compétitifs.

Second exemple : la vente de 126 avions Rafale à l'Inde. On se réjouit cette fois, en France, de ce qui apparaît comme une "bonne nouvelle" pour la France et l'industrie française.

C'est effectivement, je crois, une bonne nouvelle. Les contempteurs de la décision de Renault d'investir au Maroc semblent cette fois trouver naturel - et ça l'est effectivement - que la plus grande partie des avions en question soit destinée à être produite en Inde. Il n'y a que quelques esprits chagrins, comme Paul Quilès, ancien ministre de la Défense, qui notent, pour le regretter, que cette vente s'accompagne de transferts de technologie importants, et que cet accord va permettre à l'Inde, d'ici quelques années, de venir concurrencer la France sur ses marchés.

Cet accord, s'il se concrétise, constituera un très bel exemple du cercle vertueux de la vie économique dans un environnement mondialisé.

L'industrie française a développé, par un effort considérable de travail, de recherche, d'innovation, d'investissement, un avantage concurrentiel dans une technologie de pointe. Cet avantage concurrentiel nous permet d'obtenir des succès commerciaux à l'exportation dans des pays technologiquement moins avancés, mais en fort développement économique. Soumis à la pression concurrentielle des autres pays développés, nous sommes contraints de transférer progressivement notre savoir-faire à ces pays moins avancés, qui deviendront effectivement, dans quelques années, nos concurrents sur cette même technologie. Ces pays, dans le même temps, poursuivront leur croissance et leur développement (y compris, j'en suis convaincu, en termes de démocratie, de droits de l'homme, et de bien-être économique), et deviendront des marchés de plus en plus solvables pour nos produits, contribuant ainsi à notre propre croissance.

Ainsi, si nous nous contentons de nous regarder dans le miroir en nous gargarisant de nos succès, en nous désolant de nos échecs, ou en tremblant de peur devant la menace que constitueraient les pays émergents, il ne nous restera bientôt que nos yeux pour pleurer. Si, au contraire, nous réinvestissons fortement dans la recherche et le développement, nous avons la capacité de réinventer les avantages concurrentiels de la prochaine génération.

C'est, sans aucun doute, le véritable défi de la mondialisation (voir aussi, sur le même thème, ce billet).

(à suivre)

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